Dans le cadre des événements spéciaux du Symposium international des arts électoniques (ISEA), CHAR DAVIES présente un environnement immersif de réalité virtuelle au Musée d’art contemporain. Déroutant.

Marie-Michèle Cron

Char Davies - Tree - from Osmose (1995)
Osmose, de Char Davies: une plongée dans la réalité virtuelle.

Jeffrey Shaw nous à fait rouler à bicyclette devant un écran où défilait un paysage. Myron Krueger a projeté notre image sur l’écran de l’ordinateur pour agir avec un personnage de synthèse. Luc Courchesne nous a appris à converser avec une famille marseillaise reconstituée. Réalité virtuelle et interactivité sont devenues deux mots magiques (à la mode aussi) qui, tout en participant d’une culture technologique envahissante, peuvent être appliquées à certaines expériences sensori-motrices et esthétiques bouleversantes.

C’est le cas de Osmose, de Char Davies, présentée à la salle Projets du Musée d’art contemporain en collaboration avec Softimage — où Char Davies dirige le groupe de recherche visuelle — sous la responsabilité de la conservatrice Sandra Grant-Marchand.

Pourtant, il fait froid et noir dans la pièce et vous êtes légèrement paniqué à l’idée de naviguer dans un territoire inconnu qui vous semble aussi proche de 2001 l’Odyssée de l’espace de Kubrick que des jeux de nos bruyantes arcades pour ados en mal de sensations fortes. Détrompez-vous et pincez-vous, car les mirages aussi existent! Derrière une vitre vous séparant du public qui peut suivre l’immersion sur écran grâce à une projection stéréoscopique vidéo, muni d’un casque de visualisation et d’écoute, sanglé dans une veste qui synthonise les moindres mouvements du torse et de la respiration, vous pénétrez dans l’environnement interactif et immersif, sur lequel l’artiste travaille depuis plus d’un an maintenant avec une petite équipe de collaborateurs.

Deux d’entre eux sont d’ailleurs là pour vous conseiller et vous aider à pénétrer dans Osmose. Jusqu’au plongeon ultime, où tout seul, bougeant légèrement la tête, inspirant et expirant pour avancer et reculer, vous commencez à flotter dans les images tridimensionnelles.

Sens aiguisés, regard à l’affût, bien-être proche de la relaxation, le promeneur à la contemplation active, circule dans un paysage illuminé par une cohorte de lucioles et où gravitent des météores échappés d’une toile de Dali, mais à l’aspect fumigène. À travers des effets de superposition et de feuilletage des textures, de transparences et de couleurs synthétiques, des feuilles vous caressent, des sous-bois vous aspirent, des sons vous chatouillent le tympan, des diagrammes clignotent, et des extraits de textes de Rilke et de Bachelard dansent devant vos yeux. Expérience du vide, du vertige, mais aussi expérience inédite du corps avec une nature numérisée mais retrouvée et enveloppante comme un cocon, le temps d’un voyage singulier.

Car, si dans le champ des activités ludiques et guerrières la réalité virtuelle est synonyme de domination, de contrôle, et de vitesse, c’est plutôt l’inverse qui se produit ici où tout s’effectue avec lenteur et méditation. Char Davies accomplit ainsi un vieux rêve alors que depuis plus d’une décennie, et après avoir touché à la peinture, elle décide de casser la surface plane de sa toile et d’entrer dans le paysage technoloigique.

Un de ses buts? Renouer le dialogue entre l’esprit et la chair et reprendre contact avec une nature atrophiée par des valeurs nihilistes. Mais ça, des artistes nous l’ont maintes fois prouvé par le passé, et avec des médiums aussi traditionnels que la sculpture. Là où Char Davies innove, par contre, c’est en nous rappelant, comme le chercheur torontois Derrick de Kerckhove l’avait déjà noté, que le corps pense. Peut- être pour pouvoir affronter le réel, notre réel de plus en plus monstrueux, afirrde mieux diluer les frontières entre soi et le monde.

À découvrir et à expérimenter plutôt trois fois qu’une, mais les réservations, par téléphone (514) 847-6212, sont vivement conseillées.


Jusqu’au 1er octobre
Au Musée d’art contemporain
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Arts visuels

 

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Put online: May 2017. Last verified: June 2017